Le prestigieux Riverbend Cycling Club (RCC) regroupe des gentleman d'Alma qui prennent plaisir à rouler ensemble, le vent de dos, en descendant les côtes. Ce blog a pour but de planifier et de commenter les sorties à vélo. Au-delà de l'anecdote, ces récits sont des leçons de courage et de vertu, mettant en scène des athlètes bedonnants et grisonnants qui embarrassent les routes sans aucune gêne...

lundi 12 mai 2008

C'est pas grave...

Larouche-Lac Vert. 70 km. (32.5 k/h moy) 15°C

par Ti-Red
Il fait 15 degrés en fin d'après-midi. C'est la température la plus chaude que j'ai connue à vélo cette saison. Non seulement je roule en cuissard court, mais j'en porte seulement un (j'aime bien en porter deux -- un truc de Bear Ouellet -- pour ménager mon joli postérieur en début de saison).
Un petit incident diplomatique a perturbé le départ à la Friperie. À la dernière minute, Harold Lavoie est venu rejoindre le groupe composé de Patrice, Marc, Claude, Roger et moi.
-- Ah non, pas lui ! s'est exclamé Roger, comme s'il venait de voir apparaître le diable sur un vélo en flammes.
-- Qu'est-ce qui se passe ? a demandé Harold, embarrassé.
-- C'est ma première sortie avec les gars et je t'avertis : si tu montes le rythme d'un km/heure, je te tue !
-- Pas de problème, Roger. Pas de problème.
Harold Lavoie est le genre de cycliste qui monte le rythme sans le faire exprès. Ancien champion régional de course à pied, c'est un athlète, un vrai, qui ne se prend pas au sérieux, et que tout le monde adore. Il est au moins deux fois plus fort que la moyenne, mais il essaie de ne pas se faire remarquer tellement il aime rouler avec le groupe.
-- Heu... je me place derrière qui ? lança M­éphisto au moment de prendre la route.
À la boxe, Harold serait dans la catégorie poids plume avec ses 120 livres. Au vélo, il est dans la catégorie cache pas une goutte de vent, ce qui fait que les cyclistes n'ont pas tendance à rechercher sa roue. Comme solution, quand c'est possible, on fait rouler derrière lui le cycliste le moins vulnérable au vent, donc le plus fort du groupe. La dernière fois, c'était Danick Côté l'heureux élu, et je me demande s'il s'est rendu compte que Harold était en avant de lui.
-- Aujourd'hui, dis-je, c'est Claude Asselin qui est l'heureux élu.
-- Pourquoi moi ? se défend Claude.
-- Parce que tu es le plus fort. C'est pas compliqué.
-- Non, c'est toi le plus fort.
-- Non, c'est toi.
-- Non toi.
Le monde à l'envers : on s'obstinait tous les deux pour être le moins fort !
On a finalement opté pour un jugement de Salomon : chacun la moitié du parcours derrière Méphisto, lequel assistait à la scène, un peu gêné.
C'est moi qui prit le départ dans la roue du diabolique petit Harold. Le groupe roula à un rythme raisonnable jusqu'à Larouche, malgré les fortes bourrasques de vent d'est -- le genre de vent qui soulève des nuages de sable dans les rues mal nettoyées.
-- Ah non, il va falloir se laver les cheveux en arrivant ! aurait lancé Ralph Doyle s'il avait roulé avec nous.
Toujours fin renard, Roger Fox Filion prenait des relais courts, même très courts, afin de ménager ses forces et ainsi suivre le groupe dans la côte de Larouche. Bon calcul à court terme, car ses problèmes ont commencé dans la côte suivante, après la carrière de sable... À bout de ressource, Roger a pris un relais d'environ un mètre, avant de céder la tête à Harold qui s'est permis un commentaire de trop :
-- C'est pas grave, Roger...
Avais-je bien entendu ? Il laissait clairement entendre que Roger était en difficulté. Il l'aurait traité d'ostie de branleux que ça n'aurait pas été pire.
-- Comment ça, c'est pas grave ? s'est exclamé Roger, qui ne rate jamais une occasion de paraître insulté.
Il s'agissait du deuxième incident diplomatique de la journée. Car il existe une règle d'or à vélo qui consiste à faire semblant de ne pas remarquer un cycliste en perdition (comme dit mon'oncle Yvon) à moins qu'il le confesse lui-même. Roger, qui était descendu à l'arrière du groupe, n'avait pas cessé d'engueuler Harold, mais ses blasphèmes se perdaient dans le vent. Toujours en tête, Harold ne voulait pas lâcher le relais : il n'avait pas envi de rejoindre Roger à l'arrière du peloton. Il fut sans doute soulagé d'entendre Claude Asselin annoncer que Roger s'était détaché du groupe pour choisir un autre chemin (le rang St-Isidore) et éviter les côtes du Lac Vert.
On rattrapa Roger dans le village d'Héberville et il resta avec le groupe jusqu'à Alma. Il était même frais comme une rose lors du sprint sur Du Pont qu'il a généreusement laissé à Marc Villeneuve...
Quant à moi, je n'avais plus la force de disputer le sprint, épuisé à lutter contre le vent, durant deux heures, dans la roue de Méphisto. D'ailleurs, j'y pense : Claude Asselin n'a pas fait sa moitié du parcours derrière Harold, tel que convenu au départ.
C'est pas grave...

1 commentaire:

Anonyme a dit…

beaucoup appris