Le prestigieux Riverbend Cycling Club (RCC) regroupe des gentleman d'Alma qui prennent plaisir à rouler ensemble, le vent de dos, en descendant les côtes. Ce blog a pour but de planifier et de commenter les sorties à vélo. Au-delà de l'anecdote, ces récits sont des leçons de courage et de vertu, mettant en scène des athlètes bedonnants et grisonnants qui embarrassent les routes sans aucune gêne...

vendredi 9 mai 2008

Le gant rouge

Larouche-Lac Vert. 65 km. (32 k/h moy) 6°C

par Ti-Red
-- Il fait frette en sacrement ! a lancé André Big Bear Ouellet en arrivant à la Friperie.
Pour être exact, il a dit sacremouille... André est très croyant et ne blasphème jamais. Et c'est le seul gars que je connais qui a les bras assez gros pour dire sacremouille et garder un air viril. Il dit aussi tabarnane et calvasse...
-- J'ai pas de gant, a-t-il ajouté, et j'ai peur de geler des mains.
On est le 9 mai et il fait 6 degrés. C'est plus froid que le 5 avril, date de ma première sortie. J'ai conseillé à André d'aller acheter des gants à la Friperie. Il est ressorti au bout de deux minutes avec un seul gant.
-- Il n'ont plus de gants, les tabarnane. J'en ai trouvé juste un.
André ne blasphème jamais mais il lui arrive de voler. C'est ce qu'il a fait avec l'unique gant rouge qu'il a enfilé dans sa main droite (la plus importante, celle qui change les vitesses). Nous sommes partis en direction de Larouche, poussés par le noroît...
À cause du froid peut-être ou de la route sans relief, j'ai eu l'impression de somnoler jusqu'à Larouche, pour me réveiller à l'entrée du village, en face de l'auberge à l'aban
don. Soit dit en passant, Larouche est sans doute le seul endroit au monde où l'on abandonne des maisons abandonnées. Faut le faire : prendre la peine de déménager à Larouche des maisons qui étaient à l'abandon à Saint-Bruno, pour ensuite les laisser pourrir sur place, faute d'argent. Et le maire appelle ça un village-musée.
J'en étais là dans mes pensées, à me demander si le maire de Larouche était visionnaire ou imbécile, quand mon vaillant compagnon s'est exclamé :
-- Hey, on a 35 de moyenne, calvasse !
Mon ami Big Bear est obsédé par la moyenne. Sauf qu'il ne retient que les plus hautes, jamais les autres.
-- C'est un peu normal, on a le vent de dos depuis le départ. Attends au retour...
Je lui réponds la même chose depuis dix ans sur le vent de dos, et à chaque fois il éclate de rire, comme si j'avais dit une bonne blague ou une grossièreté.
À propos de moyenne, la saison a vraiment débuté en lion. Le mois d'avril est à peine terminé et la vitesse moyenne du peloton a souvent frôlé les 35 km/h. En théorie, c'est un peu trop vite pour un début de saison. Et d'ailleurs, chaque cycliste a sa propre théorie sur la meilleure façon de bien débuter la saison : petit plateau, courte ou longue distance, etc. Et si tout le monde s'entend sur l'importance de mouliner, personne n'est d'accord sur la vitesse maximale qu'il faut rouler. Il n'y a pas de loi universelle : on peut mouliner à 25 comme à 60 km/heure... Ce qui est universel par contre, c'est la fierté et l'orgueil des cyclistes qui ont bien du mal à admettre que ça roule trop vite. Moi le premier...
-- Ça pèse fort sur les pédales, mon André !
On roulait dans la plaine d'Héberville en direction d'Alma. Le rythme était élevé. J'étais dans le rouge.
-- Je roule trop vite ? répond-il.
-- Non, non. Ça va bien. Pas de problème. Fais-toi plaisir...
Presque couché sur les guidons, Big Bear luttait contre le vent de face. Depuis le temps qu'on roule ensemble, je sais quand il pousse la machine au max. Il bûche sur les pédales. Les coudes sont ouverts, le dos sautille. Il est un des rares du peloton à trahir ses efforts, tout comme Philippe Mimeault qui tourne la tête de côté tel un cheval qui se fait tirer sur les mors. Ou Yvon Fortin qui swing des bras comme s'il était monté sur des ressorts.
J'ai tenu le rythme, mais en serrant les dents. Le gros Ourson maintenait une cadence infernale. J'ai même songé à enlever un gant pour faire comme lui. Qui sait si ce n'était pas le secret de cette force soudaine... Mais je savais par expérience que le tempo finirait par ralentir. Ce n'était qu'un mauvais moment à passer. Et dans le pire des cas, il y a plein de trucs pour faire diversion et sauver la face : une envie subite de pisser, un ennui mécanique, une guêpe dans le casque, un bidon d'eau qui glisse des mains, une crise d'asthme, etc.
J'en connais un qui les utilise tous. Une fois, entre deux fausses crises d'asthme, il a fait semblant de retirer au moins trois guêpes dans son casque durant la même sortie, sans compter toutes les mouches qu'il avait avalé. On est revenu avec 26 de moyenne...
-- T'es en forme, mon Dan. Ça paraît que tu roules en peloton...
On arrivait dans le quatre voies à Alma et le rythme avait diminué depuis qu'on avait tourné sur la 170 à Saint-Bruno.
-- Tu trouves ?
André m'avoua qu'il avait eu du mal à maintenir mon rythme... Mon rythme ? Bravo la communication. On roulait tous les deux au-dessus de nos forces, pour ne pas paraître moins fort que l'autre...
Qui a dit que les cyclistes étaient des monstres d'orgueil ?
J'ai honte en tabarnane.

1 commentaire:

Anonyme a dit…

Les commentaires de Ti-Red sur ses sorties sont devenus très prévisibles. Toujours la même chose. En partant il souffre, il trouve les autres qui l'accompagnent meilleurs que lui et nous croyons qu'il ne reviendra pas vivant de ses extravagantes sorties.

Et ça fini toujours pareil. Ses compagnons d'infortunes arrivent à Alma vidés, épuisés, écoeurés du vélo et en trouvant notre ami Ti-Red en super forme. De plus, il termine toutes ses sorties frais comme une rose.

En particulier,depuis plus de 12 ans, il fait le même coup à Bear et ce dernier ne sans rend pas compte depuis toutes ces années.

Il ramène Bear dans sa roue en le chialant et en lui disant qu'il n'a pas de courage et qu'il est lamenteux. À ce momemnt, Bear boude et ne dit plus un mot en détestant Ti-Red et........le lendemain ? Exactement la même chose. Pauvre Bear !

Sacré Ti-Red !

Fox