Le prestigieux Riverbend Cycling Club (RCC) regroupe des gentleman d'Alma qui prennent plaisir à rouler ensemble, le vent de dos, en descendant les côtes. Ce blog a pour but de planifier et de commenter les sorties à vélo. Au-delà de l'anecdote, ces récits sont des leçons de courage et de vertu, mettant en scène des athlètes bedonnants et grisonnants qui embarrassent les routes sans aucune gêne...

dimanche 22 juin 2008

Le repos de l'indien

Lac-À-La-Croix et véloroute. 70 km. 32 moy. 20C
groupe : Sphinx, Mister Clean, Big Marc, X large, Ti-Red

par Ti-Red
Le Sphinx m'a téléphoné à 9:15 alors que j'étais encore au lit.
-- On part à 10 heures, dit-il.
-- C'est trop de bonne heure. Je suis pas encore levé.
J'ai perçu un sourire de vengeance dans sa voix :
-- Pas le choix. Ton expert de la météo a dit qu'il faut partir à 10 heures max pour éviter la pluie.
Comme on dit par chez nous, j'ai fait un boutte vite ! Je n'avais pas déjeuner, tous mes cuissards étaient dans la laveuse et j'avais une crevaison à la roue avant. Bref, j'ai mangé une banane, j'ai enfilé un cuissard humide et j'ai gonflé le pneu avant (il dessoufflait lentement...) Mais ce qui m'inquiétait surtout, c'était le fait que j'en étais à ma quatrième sortie de suite...
Mais je sais par expérience qu'on ne peut jamais prévoir, avant le départ, si on aura de bonnes jambes ou non. C'est sur le vélo, et seulement sur le vélo, que l'on peut mesurer sa forme, après avoir roulé quelques kilomètres. Combien de fois m'est-il arrivé d'avoir le souffle court et les jambes lourdes, alors que je me sentais en pleine forme après avoir bien dormi et bien mangé ?
Et le contraire est tout aussi vrai parce que, finalement, j'ai eu de bonnes jambes durant cette quatrième sortie, contre toute logique, sans aucune raison.
En fait, la seule raison que je peux voir, c'est la douzaine de beignes au miel de chez Lessage que j'enfile chaque jour depuis jeudi. Je ne suis pas superstitieux mais, par mesure de prévention, je crois plus sage de continuer d'enfiler les beignes aussi longtemps que je serai performant. Il faut dire aussi que, ces temps-ci, en plus des beignes, je mange des Ti-Coq, des Jos Louis et du Nutella en quantité industrielle. Encore là, pourquoi changer une recette gagnante ?
Je peux me tromper mais j'ai l'impression que Gros Castor Bandé se bourre la face de cochonneries lui-aussi car il pète le feu depuis deux jours. Encore aujourd'hui, il a épaté la galerie avec des numéros de pure puissance dont lui-seul a le secret.
Le premier numéro a eu lieu dans le rang 2, après le village de Lac-À-La-Croix. Le Sphinx s'était permis un relais bien senti dans le faux plat à l'entrée du village. Il a cédé sa place à Big Marc qui, contrairement à son habitude, a décidé de rouler mollo. Il a traversé Cross-Lake à 20 km/heure en moulinant sur son petit plateau. À l'arrière du groupe, je me suis permis de faire une remarque au Sphinx.
-- Ouais, Big Marc a l'air fatigué.
-- On dirait ça, oui.
-- Dans son cas, c'est Le Repos de l'indien.
La remarque a fait rigoler Mister Clean qui l'a répété à X-Large... et Big Marc l'a entendu. Il ne faut jamais réveiller l'indien qui dort...
Comme si une mouche l'avait piqué, il s'est dressé sur son vélo pour faire grimper le compteur à 45 km/h durant au moins trois kilomètres et, après quelques minutes de repos, il a mené une autre attaque dans la côte du rang 2 où, heureusement, les lois de la gravité ont fini par le calmer.
La situation est ensuite revenue à la normale. Le peloton a retrouvé un rythme régulier jusqu'à Saint-Gédéon où il a fallu ralentir à cause des festivités de la Saint-Jean. Je sais, la fête est dans deux jours, mais les rednecks du village ont déjà commencé à fêter. Paternaliste, le Sphinx a pris les choses en main. Il a réduit la vitesse du groupe pour éviter un accident, ce qui a inspiré une blague à X-Large :
-- J'espère que le Sphinx ne pense pas qu'il a fait son relais. À cette vitesse-là, ça compte pas.
-- Très mauvaise stratégie de Sphinx, ajoutai-je. Il est en train de faire reposer l'indien.
Comme un réflexe de Pavlov, le mot repos déclenche une accélération automatique chez le gros castor qui a l'oreille fine. Il est reparti comme une flèche pour faire son deuxième numéro ! Sans ralentir, il s'est mis à rouler à 45 km/h au milieu du village en zigzaguant à travers les autos et en montrant le poing aux rednecks et aux fêtards.
À bout de force, plus personne n'osait prononcé le mot repos même à voix basse. À la fin du parcours, en arrivant au quartier Saint-George, j'ai tourné seul sur la piste cyclable en direction de Riverbend alors que le reste du groupe poursuivait tout droit sur le pont. Avant de tourner, j'ai crié "Ok, repos mon gros" et je suis sûr que Big Marc a dû leur en faire baver jusqu'à la Friperie.
J'ai fini ma randonnée lentement le long de la Petite Décharge en me demandant par quoi j'allais commencer en arrivant : des Ti-Coq ou un Jos Louis ?

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